Pour remplacer la betterave « J'ai diversifié mon assolement avec le chanvre textile »
Dans le Calvados, Henri Pomikal s’est lancé dans la production de chanvre en s’appuyant sur sa maîtrise du lin.
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En 2019, un concours de circonstances pousse Henri Pomikal, installé à Fleury-sur-Orne, dans le Calvados, à s’intéresser au chanvre textile et aux outils de récolte, alors non adaptés à ce débouché. « D’abord, la fermeture de la sucrerie de Cagny m’a contraint de trouver une nouvelle tête d’assolement pour remplacer la betterave, retrace l'agriculteur, qui a présidé pendant vingt ans la coopérative linière du nord de Caen.
Puis j’ai vu en Chine des filatures traitant du lin et du chanvre. J’ai eu un petit déclic : l’aval étant connecté, il n’y a pas besoin d’investir dans tous les maillons de la filière. Enfin, Nathalie Revol, pilote des essais en chanvre pour l’association Lin et Chanvre bio, m’a convaincu de la possibilité de transposer mes compétences dans le lin au chanvre. »
Une machine à mettre au point
Henri Pomikal rejoint alors l’association qui travaille à la reconstruction d’une filière de chanvre textile française, et accueille des essais sur sa ferme de 300 hectares en limons profonds. Entre 2019 et 2023, la surface en chanvre est ainsi passée de 0,3 à près de 30 hectares, avec la mise au point d’une machine permettant de couper les tiges en deux longueurs d’un mètre et de les paralléliser au champ pour le rouissage.
Une fois ces actions réalisées, « l’utilisation des équipements liniers est possible : souleveuse, retourneuse, enrouleuse et teilleuse », précise l’association. Cette année, six machines arpenteront à la récolte les quelque 900 ha de chanvre textile entre Bayeux et Dunkerque. « On est maintenant en phase “semi-industrielle”. Le gros de la méthode est maîtrisé, mais on veut trouver de meilleurs ratios techniques. »
Sols profonds
Si on loue souvent les avantages agronomiques du chanvre, sa culture n’est pas judicieuse sur tous les types de sols, estime l’agriculteur. « En sol superficiel, vous n’aurez jamais la hauteur nécessaire pour atteindre une rentabilité intéressante. » Celle-ci se rapproche de celle du lin textile. « C’était l’objectif et au bout de deux ans, on peut dire qu’on l’a atteint. »
Le remplacement de la betterave par le chanvre a par ailleurs permis une baisse d’IFT dans la rotation, et des gains de rendements d’en moyenne 10 % sur la culture suivante.
Cette nouvelle espèce permettra également de sécuriser, par sa diversification, l’approvisionnement de la coopérative, alors que le changement climatique pénalise le lin de printemps. « En 2019, il représentait 90 % de ce qui rentrait dans le teillage. En 2022, on avait 20 à 30 % de lin d’hiver et 5 % de chanvre. Sur ma ferme cette année, je prévois un tiers de chaque », illustre-t-il.
Pour assurer la construction d’une filière tricolore, l’objectif est de fournir en priorité les teilleurs français et européens, avant de commercialiser les surplus en Chine, où se concentrent 85 % du potentiel des filatures, explique l’agriculteur.
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